name:LINÈAIRE:Instrumentation et représentations de l'Univers
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### Instrumentation et représentation de l'Univers : <br>une approche historique
#### 1 - Le rôle de l'observation dans l'astronomie
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Qui pourrait prétendre aujourd'hui que les représentations que les femmes et les hommes
se font de l'univers ne dépendent pas de l'instrumentation astronomique ? Comment ces
images somptueuses de nébuleuses, de matière interstellaire ou de galaxies seraient-elles
entrées dans nos représentations du ciel sans les grands télescopes au sol ou dans l'espace,
équipés de récepteurs sophistiqués? N'en a-t-il pas toujours été ainsi ? Poser la
question est y répondre.
Pourtant le rôle joué par l'observation dans l'acquisition des connaissances astronomiques
est objet de débat. Cette question est à rapprocher du problème que gnoséologique traditionnel
sur la fonction des sens dans l'acquisition des connaissances humaines.
<!--!!!!! *Terminologie : gnoséologie*
!!!!! À faire-->
Décliner sous de multiples formes, cette question est évoquée plaisamment par Jean de la Fontaine
dans sa fable "un animal dans la lune".
> "Pendant qu'un philosophe assure
Que toujours par leur sens les hommes sont dupés,
Un autre philosophe jure
Qu'ils ne nous ont jamais trompés.
Tous les deux ont raison ; ... "
et de poursuivre
> "La raison décide en maîtresse.
Mes yeux, moyennant ce secours,
Ne me trompent jamais en me mentant toujours."
<!--
!! *Pour aller plus loin : Jean de la Fontaine*
!! A faire
-->
Cette approche dialectique de Jean de LA FONTAINE exprime une idée implicitement
admise dans leur pratique par les astronomes modernes. C'est désormais un truisme
que d'évoquer une action correctrice de la "raison", c'est à dire de présupposés
théoriques pour "interpréter" une observation. C'est aussi une banalité que d'admettre
que la mise en oeuvre des "sens", autrement dits "des observations" est une phase
indispensable dans le processus d'acquisition des connaissances en astronomie.
Ces choses n'ont pas toujours paru aussi claires. Et aujourd'hui encore elles
sont enjeu de débat philosophique ; même si les présupposés en la matière, largement
acceptés dans la pratique et souvent inconsciemment par la grande majorité de la communauté
astronomique, constituent dans les faits le dépassement de la contradiction préconisée
par Jean de la Fontaine !
Cette situation est l'héritage d'une longue histoire de l'astronomie au cours de
laquelle deux principaux courants d'idées se sont affrontés. Cet affrontement pris
corps et se formalisa dès l'Antiquité grecque entre le IV<sup>ème</sup> et leVI<sup>ème</sup>
siècle avant notre ère. Il a subsisté depuis en traversant toute l'histoire du monde occidental.
L'un des courants établit que la perfection abstraite comme principe, premier
ayant une nature divine. PLATON, illustre porte drapeau de se courant philosophique, précise par exemple :
> " ... le dieu, ayant décidé de former le Monde, le plus possible à la ressemblance
du plus beau des êtres intelligibles et d'un Être parfait en tout, en a fait un Vivant unique ...".
Connaître le monde se réduit ainsi à rechercher la perfection abstraite, notamment
des nombres et des formes ; la démarche sera ainsi d'ordre théorique et/ou spéculatif
sans qu'à aucun moment n'apparaisse l'opportunité d'une confrontation à un autre type
de réalité concrète (qui d'ailleurs n'existe pas vraiment dans cette conception du monde).
Dans ce courant d'idées, l'instrumentation n'a pas sa place ; elle est inutile.
L'autre courant d'idée peut être illustré par les propos de LUCRECE ou ceux énoncés
un peu plus de deux siècles plus tôt par ÉPICURE.
> "Le principe qui sera notre point de départ, c'est que rien, jamais, n'est engendré
de rien par l'effet d'un pouvoir divin".
(LUCRECE, page 133 du livre de Marcel CONCHE, édition de Mégare, 1990)
> "Rien ne vient du non-être ... l'univers a toujours été et sera toujours..." (EPICURE)
> "En quoi donc devraient-on avoir la plus grande foi que dans les sens ? S'il nous trompent,
la raison pourra t'elle déposer contre eux, elle qui en est issue tout entière ?" (LUCRECE)
> "En étudiant la nature, il ne faut pas se conformer à des principes sans fondement
et à des lois abstraites, mais être attentif à ce que suggèrent les phénomènes"
(EPICURE, Lettre à Pythoclés sur les Météores)
Ce courant d'idées pose donc comme principe premier que l'univers existe indépendamment
de la conscience que l'on peut en avoir. Pour le connaître, nous allons raisonner à partir
des informations recueillies par "nos sens"("nos observations"). Il est clair que,
dans ce courant d'idées, l'observation ou la mesure occupe une place centrale.
Au point de faire dire à KANT dans sa "critique de la raison pure" : EPICURE ne
dépasse jamais, dans ces raisonnements, les limites de l'expérience.
Mais reconnaissont à KANT l'honnêteté du doute, car il place une note correctrice dans sa déclaration :
> "Tel est l'opposition entre l'Épicurisme et le Platonisme. Chacun d'eux dit plus
qu'il ne sait. Le premier encourage et fait avancer le savoir, mais au préjudice de
l'intérêt pratique ; le second fournit à l'intérêt pratique mais [...] tout ce dont
nous ne pouvons avoir qu'un savoir spéculatif, il permet à la raison de s'attacher
à des explications idéalistes des phénomènes naturels et de négliger par rapport à
eux l'investigation physique."
Sa note a été éclairante :
> "C'est, cependant, encore une question que celle de savoir si EPICURE a jamais
avancé ces principes en qualité d'affirmation objective. Si [...] il aurait montré
en cela un esprit plus véritablement philosophique qu'aucun des sages de l'Antiquité,
que dans l'explication des phénomènes, il faille procéder comme si le champ de la
recherche n'était borné par aucune limite ni par aucun commencement du monde, qu'il
faille admettre la matière du monde comme elle doit l'être, si nous voulons en être
instruit par l'expérience, que l'on ne doit rechercher d'autre origine des événements
que celle qui est déterminée par les lois immuables de la nature, et qu'enfin l'on ne
doive recourir à aucune cause distincte du monde, ce sont là, encore à présent, des
principes très justes, mais très peu observés, qui permettent d'étendre la philosophie
spéculative..." (KANT, Critique de la raison pure).
Ainsi se dessinent les conditions d'une démarche féconde qui permet de dépasser la
contradiction entre l'acceptation de l'observation comme moment fondamental de la
connaissance et la nécessité d'une représentation abstraite du phénomène étudié.
GALILEE illustre dans sa pratique le dépassement concret de cette contradiction,
ouvrant par là l'ère de l'astronomie moderne en adoptant une démarche "scientifique".
À l'idée que le monde "est écrit en langage mathématique", GALILEE ajoute une activité
de développement instrumental. Il associe dans sa pratique de recherche,
1. l'usage concret d'une nouvelle instrumentation
2. l'approfondissement d'une pensée abstraite destinée à dépasser les apparences pour
accéder aux lois essentielles des phénomènes réels.
Ce faisant, GALILEE intègre le courant de pensée, déjà formulé, confusément, par
PYTHAGORE (qui place le nombre au noeud des descriptions de l'univers) avec l'autre
courant, le matérialisme épicurien qui suppose l'existence de l'Univers indépendant
de notre conscience et place l'usage de nos sens (donc l'observation et/ou la mesure
et/ou l'expérimentation) sur le chemin de notre connaissance de l'univers. Ainsi,
contrairement à l'idéalisme philosophique de filiation platonicienne qui borne le
champ de la connaissance à la spéculation abstraite, le matérialisme épicurien devient
fécond dès lors qu'il intègre et dépasse l'horizon de la simple observation (ou de la
perception des sens) en accédant aux besoins de décrire la réalité par une théorie,
si possible écrite "en langage mathématiques". C'est cette confrontation théorie/mesure
qui fondent la démarche scientifique, notamment en astronomie.
Une théorie, une description abstraite d'un phénomène ou d'un objet, ne deviennent
"scientifiques" que si elles sont susceptibles d'induire une prévision (si possible quantitative)
qui pourra ultérieurement être confronté à la réalité par l'observation/mesure/expérience.
Cette confrontation sera un moment essentiel de la validation de la théorie ou de la
description abstraite, moment essentiel mais pas élément exclusif de validation.
La validation d'une théorie passe toujours par diverses étapes dont l'ultime, le débat
épistémologique (pluraliste) ne peut et ne doit pas être exclu.
Ainsi, nous rencontrerons, tout au long de l'histoire de l'astronomie, l'affrontement
entre ces deux grands courants. C'est cette polarisation qui crée le cadre des relations
établies tout au long de l'histoire entre le développement de l'instrumentation astronomique
et les représentations de l'univers. L'histoire de l'astronomie à l'histoire des relations
multiples tissées entre les représentations de l'Univers et les mesures (ou observations)
accomplies grâce à une instrumentation en évolution. À un instant donné l'existence
et la disponibilité d'une instrumentation ont toujours résulté de causes multiples :
volonté des astronomes certes mais aussi des possibilités technologiques et surtout,
de la capacité de disposer des ressources économiques nécessaires (avec tout ce que
cela implique dans l'organisation sociale, économique, politique et culturelle de la société).
L'histoire de l'astronomie et de son instrumentation est éclairante à ce sujet.
Elle permet de mettre en relation d'une part l'instrumentation et les représentations
de l'univers, et d'autre part les activités de recherche (au sein desquels se développent
l'instrumentation) et la société.
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<!--Comment aborder un cours sur "l' instrumentation pour l'astronomie"? La plupart des
enseignements ou des ouvrages publiés sur cette question, limitent leur champ au
traitement d'un nombre plus ou moins grand de problèmes que la _physique_ permet
de résoudre et qui ont un rapport plus ou moins direct avec les instruments (ou le
plus souvent avec des méthodes de mesure).
Pourtant, pour l'étudiant de _physique_ qui aborde une formation destinée à le préparer
à la recherche en _astronomie_, la difficulté est grande de replacer chacun des problèmes
de physique dans le très vaste champ de l'instrumentation astronomique. Les problèmes
rencontrés dans la pratique de l'astronomie, notamment pour sa composante instrumentale,
ne sont pas tous solubles à l'instant où on pourrait le souhaiter et leur identification
ne va pas toujours de soi. Enfin, l'instrumentation pour l'_astronomie_ se développe
toujours dans un champ d'activité humaine très vaste qui lui attribue un caractère
multidimensionnelle très complexe. De ce fait, tout approche fondée exclusivement sur
_la physique et les mathématiques_ ne pourra aborder une étude de l'instrumentation
en astronomique qui prennent en compte toute sa complexité. En particulier dans la
plupart des ouvrages publiés sur le sujet, la composante humaine pourtant essentielle, e
st occultée. Le but fixé dans notre approche est d'aborder de front la complexité de la question.
L'ambition est davantage d'identifier les problèmes que de les résoudre : pour beaucoup
d'entre eux, notamment pour tous ceux qui peuvent être traités par la physique,
des renvoies seront faits vers des ouvrages publiés. Les parties développées ou
détaillées seront celles qui font défaut dans les publications disponibles ou
qui sont apparues comme les plus chargés de lacunes dans les générations
d'étudiants rencontrés.
Le parti pris est de traiter des concepts susceptibles de rendre compte de la réalité d
e l'instrumentation pour l'astronomie. Cette priorité mise, des conceptions seront des
concessions seront faites, notamment avec la rigueur mathématique des calculs présentés.
Ces derniers n'ont jamais un caractère bien original et le lecteur intéressé pourra
toujours consulter les ouvrages de mathématiques adéquat. Un autre compromis a été
recherché dans le choix des questions abordées. Ce choix résulte des lacunes constatées
parmi les connaissances d'une douzaine de générations d'étudiants du DEA Toulouse.
L'objectif de ce cours étant d'être utile, beaucoup de problèmes ou de domaine,
généralement bien maîtrisés par les étudiants ont été omis ou simplement effleurés ;
d'autres, même d'un niveau modeste et en principe déjà traités (en second cycle universitaire
ou dans le cas d'autres cours) mais dans la maîtrise s'est avérée fragile, ont été abordés, parfois exhaustivement. Enfin, l'approche des questions n'a pas hésité à sortir des sentiers battus du standard universitaire. La raison est toujours autant pédagogique que philosophique. Pédagogique car des approches diverses sont toujours bénéfiques. Pour accéder à une meilleure compréhension. Philosophique car la volonté de se soustraire à un enseignement dogmatique doit enduire un comportement pratique ouvert et risqué. Plutôt que de vouloir transmettre un savoir constitué (c'est à dire un état des connaissances figé), ce cours à l'ambition d'aider les étudiants à se poser des questions sur la base de connaissances en évolution. Il leur appartiendra, ensuite, de les reformuler à leur convenance et de tenter d'y répondre en faisant appel aux connaissances acquises dans les autres cours, dans leurs études et leurs expériences personnelles.
L'approche ici présentée tente d'être globalisante pour poser les problèmes ; son
cheminement va du général au particulier, même si le général limite parfois la description
à un niveau relativement superficiel et souvent abstrait.
Les 5 questions fondamentales sous-jacentes, posées relativement à l'instrumentation
à l'astronomie, sont :
* qu'est-ce que c'est ?
* de quoi c'est fait ?
* comment ça fonctionne ?
* à quoi cela sert ?
* Vers quoi cela évolue ?
Il est très facile de répondre à ces quatre questions sur des exemples. Il est moins
aisé de les aborder d'un point de vue général. Plutôt que de tenter des réponses
séparées à chacune des questions, une démarche de mise en perspective historique
a été préférée. Cette approche est apparue plus fructueuse, ne serait-ce que pour
appréhender les effets d'évolution indispensables pour préparer l'approche au problème
de l'avenir de l'instrumentation en astronomie. Or, c'est l'avenir qui occupe la place
centrale des préoccupations dès qu'il s'agit de formation...
Enfin, notre approche c'est limité à l'instrumentation pour l'_astronomie_
du rayonnement électromagnétique.
Elle est étroitement corrélée à l'essentiel des connaissances relatives à l'univers.
Dans le passé, l'étude des météorites et des Rayons Cosmiques (particules chargées ou
neutres, animées de vitesse dans les valeurs approchent parfois en ordre de grandeur
celle de la lumière, $`c=299\,792\,458 \;m\,s^{-1}`$), a joué un rôle modeste,
comparativement à celui de l'astronomie électromagnétique. Au cours des dernières décennies,
les sondages in situ des plasma spatiaux ont apporté beaucoup à la connaissance de la
magnétosphère terrestre et du milieu interplanétaire ; mais ces mesures ne concernent
que le Système Solaire. Aujourd'hui la mesure des flux de neutrino est tout à fait intéressante,
mais son intérêt reste focalisé sur l'étendue plus précises des structures internes des
étoiles ou des phénomènes d'explosion de supernova. La détection des zones gravitationnelles
ouvre les perspectives d'une nouvelle astronomie tant les potentialités en ce domaine son
vastes : mais nous nous sommes encore aujourd’hui que dans des phases initiales de programmes
envisagés pour le siècle prochain.
Aussi, nous paraît-il acceptable de borner, pour l'instant, l'étude de l'instrumentation
à celle de l'astronomie du rayonnement électromagnétique.
Afin d'alléger la lecture, trois types de renvois ont été systématiquement faits. Les références
bibliographiques sont rejetés dans l'annexe A4 où elles ont été classées par chapitre.
Chaque nom des grandes figures de l'astronomie fait l'objet d'une fiche ; ces fiches sont
classées par ordre chronologique dans l'annexe 1 ("fiches biographiques et séquentielles).
La description de chaque type d'instruments et celle de quelques systèmes instrumentaux exemplaires
ou récents a été renvoyée dans des fiches classées dans l'annexe A2. Quelques rappels de
techniques mathématiques élémentaires sont indiquées dans l'annexe A3. Enfin, un lexique des
mots clés a été rédigé et mis dans l'annexe A5 : ce lexique est d'importance car comme l'a écrit
EPICURE dans sa lettre a Hérodote : "il faut savoir à quoi renvoie les mots afin que nous ayons
une pierre de touche à laquelle rapporter les opinions... afin que les notions restées floues
ne nous rejettent pas dans l'incertitude... afin que nous ne parlions pas pour ne rien dire."
Enfin, le souci majeur qui a présidé à la réduction de secours et __la mise en relation__
d'éléments que la réalité rassemble mais que l'approche cloisonnée des disciplines dissocie
(y compris au sein de la physique lorsque, par exemple, il faut passer de la photométrie à
l'optique géométrique, puis à l'optique ondulatoire, puis à la physique quantique appliquée
à l'étude des photons). L'approche est donc délibérément multidimensionnelle au risque de
demeurer superficielle. Les sciences construisent des démarches, étayées par des présupposés
philosophiques : l'histoire de l'astronomie illustre superbement se fait. Pourtant, un prudent
silence évite presque toujours d'afficher ces présupposés et de discuter cette mise en relation
science/philosophie. Le risque a été pris de l'évoquer clairement en avançant sans masque.
Au lecteur de corriger les biais qu'il ne manquera pas de discerner, et d'entreprendre un
travail personnel pour penser par lui-même.
Guy Serra
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#### 2 - L'astronomie et les préhistoires
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Quand commence l'astronomie ? Sans doute il y a bien longtemps lorsque la pensée
abstraite est devenue accessible aux femmes et aux hommes de la préhistoire.
Encore qu'il faille se méfier des mots. L'astronomie de ses époques reculées n'avait
de commun avec la nôtre que l'objectif de connaissance de l'univers ; cet univers
pouvant souvent se réduire au ciel avec les phénomènes qui s'y déroulent. De plus,
le mot "préhistoire" s'applique à des époques et des sociétés humaines qui ne possèdent
pas l'écriture. Autant dire que la préhistoire ne peut pas se réduire à un intervalle
de temps dans une chronologie universelle de l'évolution humaine.
Il n'y a pas une préhistoire, mais de nombreuses préhistoires dans certaines s'achève
de nos jours. L'étude des sociétés préhistoriques quasi contemporaines montre toute la
richesse culturelle que de telles sociétés peuvent avoir. Malheureusement, l'absence
d'écriture établit un certain type de limitation absolue dans l'acquisition et la
perpétuation des connaissances. En particulier, le savoir va évoluer sans cesse en
perdant la connaissance des états antérieurs. Aussi est-il très difficile, souvent
impossible, de percevoir par exemple, quelles étaient les connaissances astronomiques
des sociétés préhistoriques de l'Europe occidentale. Certains chercheurs voient dans
des monuments mégalithiques, comme celui de Stonehenge en Grande-Bretagne, des observatoires
enregistrant les directions caractéristiques des solstices et des équinoxes. Si tel
était le cas, le gigantisme dans l'instrumentation astronomique ne date pas d'aujourd'hui!
Mais il est bien difficile de conclure sur ce sujet, à cause de la pauvreté des informations
disponibles à ce jour.
Sans doute aussi, existait-il dans l'Amérique précolombienne des "observatoires"
astronomique de pierre (Le Caracol de Chichen Itza au Yucatan ?) permettant la mesure
d'angles formés par différentes directions des astres "visibles", dont les plus importants
étaient, d'évidence, le soleil et la lune. Il s'en est fallu de peu pour que nous
puissions beaucoup mieux connaître cette "astronomie" et ses instruments puisque
le peuple aztèque, par exemple, possédait une langue et un ensemble de signes constituant
une forme très archaïque d'écriture.
Les Mayas avaient eux aussi, dès le V<sup>ème</sup> siècle, deux types d'écriture primitive.
Malheureusement les conquérants européens, dans leur volonté d'imposer le dogme chrétien,
détruisirent la plupart des manuscrits mayas et aztèques dont beaucoup avaient, pour support,
des écorces d'arbres. Il ne reste aujourd'hui que des monuments de pierre dont une des fonctions
semble bien avoir été celle d'observatoires astronomiques ; des recherches sont en
cours sur ce sujet. D'autres vestiges existent comme, par exemple, un objet en mosaïque,
calendrier aztèque attestant une connaissance du temps corrélé au mouvement des astres.
Indépendamment de l'écriture, des gravures sur roche témoignent de l'intérêt que les
êtres humains ont souvent porté au phénomène du ciel. Des symboles figurants la lune,
le soleil et les étoiles ont été gravés sur de nombreux rochers depuis les Pyrénées
jusqu'en Amérique du Nord. Mais l'interprétation de tous ces pictogrammes demeure
problématique. Il faut attendre l'écriture pour accéder à un ensemble suffisant
d'informations pour caractériser une "astronomie".
Ce n'est probablement pas un hasard si les trois foyers indépendants d'apparition
de l'écriture coïncident parfaitement avec les trois sites où s'est accomplie,
quelques millénaires plutôt et de manière probablement indépendantes, la révolution
néolithique.
Voici environ une dizaine de milliers d'années, des peuples se sédentarisent en Mésopotamie,
en tirant principalement leurs ressources d'une agriculture naissante. Cette révolution
constitue le passage des sociétés préhistoriques paléolithiques (dont l'économie repose
entièrement sur l'exploitation directe des ressources naturelles par la chasse, la pêche
et la cueillette) aux sociétés néolithiques déjà proches des civilisations protohistoriques.